La Malédiction du pont Saint-Louis

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Une chronique de 1427, en pleine guerre de Cent ans, nous rapporte que le 17 août de cette même année, douze pénitents parvinrent jusqu’à l’île de la Cité. L’équipée  était constituée d’un Duc, un Comte et dix hommes à cheval. Ils déclarent être des chrétiens de la Basse-Egypte chassé par les sarrazins.

Les gitans s’étaient rendus à Rome pour confesser  leurs pêchés auprès du Saint Père. Le pape Martin V  leur avait infligé  comme pénitence d’errer sept ans de par le monde.

Martin V –  Pape de 1417 à 1431 –
I-Colonna

Après cinq années d’errance, quand ils arrivent à Paris, sur les 1200 du départ, ils ne sont plus que 120, hommes femmes et enfants.

Tsiganes

L’arrivée des Tsiganes à Paris fait sensation. La foule, qui vient les voir en nombre, est surprise par leur aspect physique : « Ils ont les oreilles percées ou pendent une boucle d’argent. Leurs cheveux sont noirs et crépus » ,  « Leurs femmes très laides, sorcières, larronnesses, elles sont diseuses de bonnes aventures ». 

 

La diseuse de bonne aventure, par Georges La Tour.
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L’effet de curiosité passé, l’hostilité envers les Bohémiens se développe et prend de l’ampleur.

L’évêque excommunie les diseuses de bonne aventure et les fidèles qui auraient recours à cet acte de sorcellerie.

Devenus indésirables les bohémiens sont bannis de la Cité.

Le huit septembre,  jour de la Nativité de Notre-Dame, on les force à prendre le bac. On les dépose par groupe sur les berges de l’île Notre-Dame, actuelle proue de l’île Saint-Louis, en attendant de les refouler plus loin.

Les « pénitents« , furieux par le sort qu’il leur est réservé, jettent le maléfice au bras de la Seine qu’on les avait forcés de franchir.

 

DEPUIS, EN CET ENDROIT PRÉCIS, IL SE PASSA DES CHOSES ……

 

Un premier  pont de bois est construit en 1627-1634 entre les îles de la Cité et Saint-Louis. Son tracé est oblique, pour ne pas offenser les chanoines qui refusent de le voir déboucher en face du cloître Notre-Dame.

Le 5 juin 1634 jour de l’inauguration, trois processions se disputent le passage pour accéder à Notre-Dame. D’une terrible bousculade on tire un bilan impressionnant : 20 morts et 40 blessés.

Carte de Paris – Robert de Vaugondy – 1760-
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Ebranlé par une débâcle en 1709, il est reconstruit en 1717. Comme il est peint, on l’appelle le pont Rouge, ce qui avait été le surnom du pont emporté en 1684 et remplacé par le pont Royal.

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De nouveau emporté par une crue, il est démoli en 1795 et reconstruit, en pierre, perpendiculaire au berge en 1804. On l’appelle alors le pont de la Cité.

Il est restauré en 1842, puis reconstruit en en fonte en 1961. Il prend alors le nom de pont Saint-Louis.

S’étant effondré en 1939 après le choc de deux péniches, il sera remplacé par une passerelle métallique.

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En 1968, le pont actuel voit le jour, avec des lignes sobres pour ne pas nuire au site prestigieux de Notre-Dame. En poutre et en acier, il permet de traverser simplement la Seine.

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Après avoir pris connaissance de cette succession d’événements, si l’on est un peu superstitieux, l’on ne peut franchir ce pont sans ressentir une certaine appréhension.

 

 

 

Sources.

Rue des Maléfices de Jacques Yonnet -Editions libretto -2004-

Journal d’un bourgeois de Paris – Alexandre Tuetey – 1881-

http://www.histoires-de-paris.fr

Paris- Deux mille ans d’histoire -jean Favier Fayard 1997

 

2 réflexions sur « La Malédiction du pont Saint-Louis »

  1. C’était passionnant… Cela me fait penser à l’atmosphère des romans d’Eugène Sue où Paris se pare de mystère et d’ésotérisme.
    Toutes les superstitions s’enracinent dans la réalité sinon elles n’existeraient pas et il existe bien des lieux frappés de malédictions en ce monde. On est libre d’y croire ou pas, force est de constater que des choses se passent, il est très intéressant de les observer.
    Merci pour ce billet foisonnant et très bien illustré. Une fois de plus, on constate que l’Autre, celui que l’on affuble du mot « étranger » et que l’on qualifie d’étrange est rejeté manu militari là où l’on ne veut pas le voir, là où l’on ne veut pas l’entendre et qu’on l’accuse ensuite de tous les maux.
    Grosses bises Gérard et à très bientôt
    Cendrine

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